Crète : portrait croisé de 3 femmes inspirantes
Les vignes bio d'Alexandra Manousakis
Alexandra Manousakis est née à Washington et a fait des études d’art à New York. Depuis toujours, elle partage avec son père un attachement viscéral pour la Crète. Ce dernier a fait planter en 1993, sur les coteaux de Vatolakkos, son village natal, les premiers pieds de vignes du domaine Manousakis. Entouré d’experts de renommée internationale, il choisira les cépages les plus adaptés à cette terre qu’il avait quittée alors qu’il était encore enfant.
Lorsqu'en 2007, la crise des subprimes pointe son nez à New York, alors qu'elle débute une carrière dans le marketing, elle décide de partir pour une année sabbatique sur les terres de ses aïeux. Elle a 23 ans et a pour mission de développer le domaine familial et ses vignes bio. Quatorze ans ont passé et les vins de Manousakis sont désormais exportés aux quatre coins du monde.Attachée au terroir et à son histoire, Alexandra a remis au goût du jour d’anciens cépages locaux comme le vidiano de Réthymnon, ou encore le romeiko de La Canée. Ce dernier, tristement célèbre pour les maux de tête causés par la piquette dont il était à l’origine, a été oublié pendant des années. Avec la complicité de son mari Afshin Molavi, sommelier au domaine et co-propriétaire du fameux restaurant Salis, le cépage retrouve ses lettres de noblesse en passant du rouge au blanc. Le Nostos Romeiko qui en est issu est un vin blanc frais aux arômes de fruits. Un régal !
Ne s'arrêtant pas à ce succès viticole, Alexandra mène en parallèle une carrière d’artiste. Ses céramiques pleines d’humour et de poésie illustrent son expérience parfois cocasse de la Grèce et ses questionnement sur la notion d'identité. Avec Afshin, ils ont ouvert récemment Miaimi. Sur la plage de Koum Kapi, ce délicieux restaurant méle influences persanes et cuisine fusion grecque, il abrite aussi un des ateliers d'Alexandra ainsi qu'une galerie présentant son travail pop et inspiré.
Danaé Kindeli, une maison d’hôtes entre ferme et histoire
À La Canée, dans ce qui fut autrefois le kambos , c’est-à-dire la périphérie agricole de la ville, se niche Metohi Kindelis, une majestueuse bâtisse aux murs ocre rouge entourée de champs, de vergers et de jardins.
Cette ancienne maison d’été, construite en 1650 sous l’occupation vénitienne, fut transformée par les Ottomans en metohi (ferme). Propriété de la famille Kindelis depuis un siècle, c’est aujourd’hui une très belle maison d’hôtes de trois chambres dirigée par Danaé Kindeli. Promise à une belle carrière dans les relations internationales, Danaé a elle aussi succombé aux sirènes crétoises et quitta Madrid pour revenir sur son île natale. Hôtesse passionnée et passionnante, elle a réussi en moins de 10 ans à faire de la petite maison d’hôtes un hébergement reconnu et plébiscité. Chaque année, elle développe de nouveaux projets autour de l’accueil : visite de la ferme, cours de cuisine et dégustation de vins, soins…
Côté ferme, c’est Manolis Kindelis, l’oncle de Danaé, qui est aux manettes. Ce passionné de botanique, qui a fait ses études d’agronomie en Italie, a patiemment façonné la ferme au gré de ses envies et de ses expériences. Pionnier de l’agriculture biologique en Grèce, il cultive quelques 25 espèces qui bénéficient d’un microclimat exceptionnel. Parmi elles, des espèces subtropicales qu’il a réussi à acclimater, comme les avocats, les mangues, les litchis ou le gingembre, que les hôtes peuvent déguster au pétit déjeuner avec d'autres délicieux produits locaux.
Chloé Dimitriadis, de Mc Gill à l’olivieraie d’Astrikas
Dans le village d’Astrikas, en surplomb de la mer et à l’ombre de l’impressionnant mont Rokka, Chloé Dimitriadis représente la 6e génération de sa famille à cultiver les oliviers. Son père, un temps parti au Canada, revient sur ses terres à l’âge de 27 ans et créé Biolea dans les années 90. La Crète qu’il a laissée et celle qu’il retrouve plusieurs années après, n’ont plus rien à voir : l’île s’est industrialisée rapidement et massivement. En réaction, il décide d’aller à contre-courant. Son huile d’olive sera bio, sans pesticide, sans herbicide, sans fertilisant chimique, sans apport en eau et sans utilisation de machines lourdes pour la récolte, car elle favorisent l’érosion des sols.
Plus de vingt ans après, dans une lettre qu'il écrit à sa fille, fraîchement diplômée en sciences politiques de la prestigieuse université canadienne Mc Gill, il lui passe officiellement le flambeau. Grâce à Chloé, l’entreprise familiale modernise l’extraction de l’huile et améliore ainsi sa qualité et sa richesse en antioxydants et en polyphénols. Mais la méthode de production reste traditionnelle, ce sont encore d'énormes meules en granite qui écrasent les précieuses olives. L’exploitation aux 2500 oliviers réalise aujourd'hui 14 tonnes d’huile d'olive qu'elle exporte en Europe du Nord, au Canada, et même à Taïwan.
Pour développer l’attractivité du lieu, Chloé propose des visites guidées et a ouvert un bistrot où l'on déguste son huile d’olive avec d'un verre de vin et de bons petits plats.
Visite guidée sur rdv. Restaurant ouvert en saison du mardi au dimanche de 9h à 17h